Jules et le chien

Jules et le chien

Extrait du roman de Pierre Galibert « Le livre sur la commode »

 

Le fonctionnement de notre mémoire reste mystérieux. J’ai parfois du mal à me souvenir de mes activités d’une semaine sur l’autre, et là, allez donc savoir pourquoi, les dix chiffres qui composent leur numéro de téléphone sont revenus instantanément. Sans réfléchir. Je n’ai pas eu besoin d’aller les chercher dans mon agenda électronique. Pourtant, je ne les avais pas composés depuis plusieurs années. Entre deux rendez-vous dans mon bureau catalan, je décroche le téléphone sans réfléchir. Comme je l’ai fait mille fois par le passé, mon doigt tape automatique sur le clavier. La gentillesse perce toujours dans la voix de Pierrot. Il m’accueille chaleureusement. Suzy n’est pas loin et nous voilà partis instantanément dans les souvenirs. Comme si nous nous étions quittés la veille.

Je me souviens, à quelques jours de mon mariage, avoir passé une soirée chez Pierrot et Suzy. Nous partageâmes, Anne et moi, les discours chargés de clémence sur la vie, les relations aux autres, l’importance de l’engagement du mariage, l’éducation des enfants. Sans jugement. L’écho de ces riches échanges résonne  encore dans ma tête.
Comme Jacques et Madeleine, Pierrot et Suzy ont tout fait aux Bonnes Vacances. Ils débutèrent par la plonge en 1973 et logeaient sous tente, devant le chalet. Suzy fut chargée, ensuite, de l’économat des séjours durant de multiples saisons. Pierrot jetait un regard bienveillant sur les équipes et le fonctionnement ; il mettait ses talents de bricoleur au service des séjours.

Jules et le chien

Luis Goma et Pierrot Battut au premier plan. Derrière : Pierre Galibert, jean-Luc Donnadille et Olivier Rey

 

Cette année-là, Virginie Thouroude avait dans son équipe un enfant très rude. Le petit Jules accaparait sa monitrice et avait besoin d’un animateur pour lui tout seul. L’enfant fuguait. Il était brutal et parfois dangereux pour lui et pour les autres. Pierrot fut le seul à trouver une solution : il partait avec Jules promener son chien Fidji derrière la colo. Jules d’une main tenait la laisse et de l’autre Pierrot qui commençait à apprendre sa future tâche de grand-père. Le retour de la promenade se faisait par les pruniers derrière le chalet. La cueillette finissait par calmer définitivement le turbulent et l’équipe pédagogique était  soulagée. Chaque fois que j’allais chez Pierrot et Suzy, leur chien attaquait  mes pneus et mon pantalon mais je ne lui en ai jamais voulu car, grâce à son maître, ce sacré Fidji nous a rendu un fieffé service.

Pierrot et Suzy, couple de Bâtisseurs, mirent en selle, en restant dans l’ombre, les jeunes directeurs qui débutaient alors : Alain Ségui, Jean-Luc Donnadille et moi-même. Ils étaient, par leur expertise, leur écoute et leur gentillesse naturelle, de précieuses personnes. Ils aidaient aussi au bon fonctionnement de la partie technique des séjours et nourrissaient de belles relations avec des cuisiniers parfois ingérables. Avec Jean-Luc, nous nous souvenons de leur contribution généreuse et efficace quand nous étions des directeurs novices. Si Jean-Luc est là aujourd’hui, si je l’accompagne, c’est grâce à eux, à Luis et Mado, Jacques et Madeleine.

 

Vous pouvez télécharger gratuitement « Le livre sur la commode » de Pierre Galibert